Baby boom
Hé merde. Encore une. Elle vient de m’annoncer qu’elle est enceinte. Elle aussi, à son tour. Elle, que je connais depuis plus de vingt ans, que j’ai vu grandir comme un miroir en face de moi, et qui aujourd’hui, d’un coup, grandit plus vite, ou différemment.
Cernée. Je suis cer-née. Des nouveaux nés en veux-tu en voilà, des mouflets à la pelle, des bambinos au kilo. Ils sont partout. Autour de moi, ça explose comme du popcorn. Ah ça, le repeuplement de la France n’est pas en danger, c’est moi qui vous le dis. Quand ça cause pas malaise et nausée des premiers mois, ça papote biberons et choix du prénom. Léo, Théo, Emma ou Eva ? (Je vous épargne une recherche inutile, les gars, voilà le quarté gagnant des prochains mois. De rien, c’est cadeau).
Effet d’âge, sans aucun doute. A trente ans passés, forcément, les copains-copines pensent tous les uns après les autres à pondre leur marmaille et à assurer leur digne descendance. Il en résulte d’ailleurs un bien joyeux bordel à chaque fois qu’un couple de nouveaux parents est invité à dîner ou à prendre un verre, ou bien que l’on décide vaillamment de partir en week-end ou en vacances tous ensemble.
Perso, j’hallucine quand même sur l’armada de boxon nécessité par une aussi petite chose qu’un bout de chou de quelques mois. Lots de couches, biberons et boîtes de lait, Maxi-Cosy pour la sieste, joujou qui fait de la lumière pour s’endormir, tétines, exemplaire n°4 de Sophie la girafe, poussette pas toujours pliante… heu, non mais ho ? Faudra bientôt louer un train complet pour faire un aller-retour Paris/Bordeaux accompagné d’un mioche. La blague.
Sinon, je ne sais pas qui raconte partout qu’un bébé, ça pionce tout le temps. C’est complètement faux. Mes oreilles en sont témoins : non seulement ça pionce pas tant que ça, mais en plus, ça braille. Et ça braille sec. Et en continu. Moi, ça va encore, je suis habituée au bruit permanent, avec mes tarés de voisins qui passent leur journée à s’engueuler sur fond sonore de « roue de la fortune » et autres dechavanerie (je sais, j’en ai de la chance). Mais j’en connais un ou deux qui ont souffert. « Font-ils des muselières pour Godzilla en grenouillère ? », chantait Aldebert (qui doit avoir les mêmes potes que moi, semble-t-il).
…
Bon. J’ai l’air de me plaindre, de râler et de critiquer, là, comme ça. (Ah ouais ?).
Mais bien tapie au fond de moi, la fibre maternelle commence malgré tout à s’éveiller lentement. Pas tout de suite, pas maintenant. Mais un jour, c’est sûr.
Faudrait juste que ma chère mère arrête de chouiner partout qu’elle veut des petits enfants pour jouer à la mamie gâteau. Parce que je la connais, celle-là. Aujourd’hui, elle se dit prête à passer ses dimanches à faire de la compote pommes-bananes au mixeur et à jouer à l’avion pour filer les cuillerées de purée, mais le jour où il me faudra une baby-sitter gratos pendant une semaine non-stop pour que j’aille prendre des coups de soleil en binôme amoureux à Saint-Barth (oui, oh… ça va, si on peut plus fantasmer, hein ?!), j’ai comme l’impression qu’elle sera beaucoup moins orientée rouleau à pâtisserie et autres lectures de Cendrillon au coucher. Bizarre, non ?
Bon, c’est pas tout ça, mais j’ai encore trois cadeaux de naissance à trouver, avec toutes ces conneries. Ah franchement, merci bien. J’essaye d’être sage et de me tenir éloignée des boutiques jusqu’à Noël (et que je ne vous entende pas glousser, hein, c’est très sérieux), mais si on me pousse à la consommation par souci du respect des coutumes, je ne réponds plus de rien. « C’est pas d’ma faute, monsieur, on m’a forcée ». Que ce soit bien clair. Vous viendrez me voir en prison ?